FONTAINE D'AUDEGE

> NATURE/CONSTRUCTION : Édifice en pierre de Bourg. Fontaine alimentée par 7 sources canalisées.

> ÉTAT: Visible et toujours en eaux, mais à 2m en sous-sol.

NOTE: Au moyen-âge, le nom de la source n'avait point encore subi d'altération , elle,était appelée Fon-dau-duje. Les Anglais, qui n'étaient pas tenus de savoir le gascon de Bordeaux, latinisèrent ces trois mots, dont ils firent Fons-Odeja, joignant ainsi l'article Dau et le nom propre. Plus tard, on a francisé l'expression odeja, et l'on en a fait Fon-d'Audege.» 

Coordonnées GPS: 44.84688, -0.57988.

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Le quartier Saint-Seurin n'était pas seulement un des quartiers les plus vastes de Bordeaux : il est un de ceux qui furent le plus anciennement habités, le plus tôt et le plus vite bâtis. Ses origines remontent très loin dans le passé, jusqu'à l'époque gallo-romaine...

Le faubourg Saint-Seurin possédait jadis trois grandes routes. L'une était la vieille route romaine du Médoc (rue Fondaudège-rue de la Croix-de-Seguey). Elle porte souvent dans les livres le nom de "magnum iter ". C'était aussi la «magna via de Solaco», le grand chemin par où l'on va de la porte Saint-Germain au Bouscat. Au XVIIe siècle, elle formait la séparation, dans la paroisse de Saint-Seurin, des deux quartiers de Caudéran et du Bouscat. Et comme elle était proche de la fontaine d'Audège, on disait aussi d'elle que c'était la voie « prope fontem d' Audeuya». Dans la paroisse Saint-Seurin, elle avait une valeur de ligne frontière, puisqu'elle séparait l'un de l'autre deux quartiers; mais c'était aussi une voie importante pour le ravitaillement de Bordeaux. C'est par elle qu'arrivaient à la ville les produits du Médoc, et notamment le sel de la côte.

La rue Fondaudège a ainsi remplacé l’ancien "Chemin de Soulac" (Camin de Soulac). Elle a repris le tracé de l'ancienne Lébade au-delà de l'ancienne porte Saint-Germain, l'actuelle place Tourny. (Lébade/levade : mot d'origine gasconne signifiant « levée (de terre) », utilisé en Gironde pour désigner des voies anciennes connues depuis l'époque médiévale. Ces voies ne sont pas des chaussées empierrées comme les voies romaines, mais de simples élévations de terre, larges d'une dizaine de mètres et bordées de fossés, qui permettaient aux voyageurs de traverser à pied sec les landes humides de Gascogne).

Elle desservait sur son côté ouest l'ancienne chapelle Saint-Germain, détruite au XVe siècle, le quartier des tanneries où se trouve la fontaine (côté est), puis passait à proximité des arènes dites "Palais Gallien".

[Les eaux de cette fontaine - dont le trop plein était recueilli dans un réservoir - étaient excellentes pour le lavage des cuirs (« adouberies de cuyrs »). Cette industrie malodorante du cuir, par la volonté des Jurats à la fin du XVème siècle avait été déplacée des rives du Peugue en centre-ville sur des terrains hors les murs qu’ils achetèrent près de la source d’Audège dont les eaux servaient également aux fabricants de « cordes à boyaux » pour les violons. Ces tanneries s’étaient ainsi installées sur ses bords, elles ont laissé jadis leurs noms à différentes ruelles: rue et impasse des Tanneries].

Cette rue tire donc son nom de la fontaine d'Odeia, source du petit affluent de la Garonne connu sous le nom d'estey/ester/esterium/ruisseau d’Audeyola (nommé ainsi déjà au XIIème siècle) qu'elle longeait sur sa rive droite. Ce ruisseau se jetait dans la Garonne au « peyrat des Chartreux » (aujourd’hui le Pavé des Chartrons). Le nom antique de la fontaine a donné en gascon l'appellation Houn d'Audeya, corrigée en Font d'Audège, dont Fondaudège est une forme "agglutinée".

Ce ruisseau d’Audeyola descendait donc depuis la fontaine d’Audège et se jetait dans la Garonne près de la Tour d’Audeyole. Au commencement du XIVème siècle, lorsqu’on enveloppa toute l’ancienne ville dans un vaste réseau de fortifications (second accroissement de remparts de la ville), on détourna le cours naturel du ruisseau et on se servit de ses eaux pour inonder les fossés du Nord. Bordé en partie de maisons et suivant un chemin, il passait alors près de la Vieille Corderie et de la porte Saint Germain. 

En 1559, on y exécuta quelques travaux: les  Jurats firent faire une muraille à la fontaine d'Audège pour la séparer du grand chemin et empêcher que les terres ne tombent dans le vase de la fontaine... La fontaine était donc située juste en bordure de la rue Fondaudège.

En 1787, il existait dans le quartier Fondaudège des bourbiers si profonds que, pour pénétrer en ville, les équipages venant du Médoc devaient faire le tour par l'allée des Noyers. La zone était donc très humide au point de devoir la contourner...

Comme on avait creusé des puits sur plusieurs points de la ville et dans les environs de la fontaine Fondaudège, on craignait d’en avoir fait tarir la source en donnant d’autres écoulements aux eaux. Prévoyant cette éventualité, en 1607  le maréchal Dornano dépensa beaucoup d’argent pour conduire les eaux de la Fondaudège devant le Château Trompette où il fit ériger une fontaine surmontée d’une pyramide.

=> Voir le détail de cette fontaine sur ce site ici: https://www.bordeaux-qqoqccp.com/themes/fontaines-de-bordeaux/fontaine-du-chateau-trompette

En 1808, ces eaux furent également conduites à la Fontaine Daurade au coin de la rue Pont-de-la-Mousque. Il existe un aqueduc venant de la fontaine d'Audège conduisant ainsi de l'eau à cette fontaine. Le canal de décharge de la fontaine Daurade débouche dans celui de la maison Fonfrède débouchant lui même dans le canal principal de la fontaine d'Audège.

=> Voir le détail de cette fontaine sur ce site ici: https://www.bordeaux-qqoqccp.com/themes/fontaines-de-bordeaux/fontaine-daurade

Cependant les maisons bâties sur le canal (produisant l’obstruction par des immondices) et la négligence du fontainier (ne fermant pas la palle et laissant ainsi pénétrer la vase de la marée dans les tubes de plomb) priva le quartier du Chapeau Rouge de cette eau. Les habitants du voisinage de Fondaudège profitèrent ensuite pour la faire affluer dans leurs puits...

En 1866, les eaux de la Font d'Audège vont alimenter la fontaine publique sur la place Fondaudège (actuellement Place Charles Gruet: nom d'un ancien maire de Bordeaux) => Voir détails sur ce site ici: https://www.bordeaux-qqoqccp.com/themes/fontaines-de-bordeaux/fontaine-charles-gruet. (Celle-ci sera parfois faussement appelée par la suite "Fontaine d’Audège").

Après 1871, les eaux de la fontaine d'Audège n'alimentèrent plus la fontaine de Charles Gruet. Et la fontaine (avec sa pompe) de la rue des tanneries n'ayant plus non plus utilisée en surface, les eaux de cette source se perdaient alors dans les égouts de l'ancien passage des tanneries. M. Durieu de Maisonneuve, directeur du Jardin des Plantes, eu l’heureuse idée de les recueillir et de les faire serpenter dans le Jardin Public jusqu'à la "rivière".


Une couronne surmonte l’ensemble avec des motifs de plantes aquatiques (: feuilles d’eau, joncs et nénuphars) sculptés par Jean-Marie-Florent Bonino (auteur notamment des décors de la Fontaine de la Grave, de la Fontaine Rue Royale, de la fontaine colonne de marbre, des 2 colonnes rostrales de la Place des Quinconces et des tombeaux de Pierre Lacour et du colonel Joseph Deschamps au cimetière de la Chartreuse). Cette borne au niveau du socle, portait un mascaron d’aspect hybride, humain et léonin à la fois (aujourd’hui disparu).

L’inscription gravée sur sa face principale indique que c’est sous l’administration de Monsieur Charles Lemercier de Longpré, baron d'Haussez , conseiller d’Etat, gentilhomme de la Chambre du Roi, maire de la Ville de Bordeaux, qu’elle fut restaurée. (plans originaux ci-après:)

En 1827, l’ingénieur hydraulique de la ville Gabriel-Joseph Durand recouvre la source d’un petit édicule en forme de borne adossé à une construction parallélépipédique qui abrite le système de fontainerie. Les murs sont en parpaings de pierre de Bourg. La couverture, plate, est bitumée.

Sur le grand côté, une porte donne accès au système de fontainerie et à l’escalier intérieur qui descend au niveau de la résurgence d’eau. Elle avait également une 

Sur le plan dressé ci-dessous, on peut voir repérées 5 sources, cependant il s'agissait en fait au total de 7 sources canalisées en commun qui alimentaient la fontaine publique. (Les habitations construites par dessus ce réseau durent respecter des consignes concernant les fondations, l'évacuation des eaux usées et les forages). On voit également sur ce schéma qu’un système de vanne/robinet permettait aussi de réguler le débit, avec l'adjonction d'un dispositif d' "échapoir" pour évacuer le trop plein d'eau. Les eaux perdues de la fontaine et le trop plein d'eau étaient évacuées par le canal menant à la rivière du Jardin Public. (On peut trouver d'ailleurs un texte de 1871 précisant un débit de 240L/min). 

On peut noter la présence d'un escalier souterrain en colimaçon descendant au milieu de l'actuelle rue de la Ville de Mirmont, permettant d'accéder à la prise d'eau de la fontaine et à un robinet d'arrêt. Et à l'angle de l'actuel Passage Robert Picqué, un second escalier donnant accès à la résurgence d’eau, à la pompe qui faisait monter l’eau à la surface du sol, ainsi qu'à l' "échapoir" du trop plein...

(Vue superposée en Coupe des Niveaux)

Hypothèse: On peut voir sur ce schéma, après la "prise" un "robinet" sur une "ligne/trait" qui continue même en dessous de l'escalier en colimaçon. Il est éventuellement envisageable que ce puisse être l'ancienne canalisation qui avait été installée en 1607 pour amener les eaux à la fontaine Trompeyte, puis reprise en 1808 pour mener les eaux à la fontaine Daurade. Il est possible aussi que ce ait pu mener à l'ancien fossé d'évacuation. (hypothèses à confirmer...)

Remarque: On voit également sur le plan ci-après, qu'un "aqueduc" ramenait l'eau du fossé parallèle (de l'actuelle Rue de Mirmont), dans le "canal" principal vers le jardin public. D'autre part sur ce même plan, le "canal" croise la "rue de la bonde" aujourd'hui disparue...

Ci-contre les emplacements possibles des 2 anciens escaliers souterrains.


(QUESTION: Comme pour la fontaine Daurade, les 2 plaques devant l'édifice donnent-elles toujours accès à l'ancien escalier qui descendait à la résurgence et à l' "échapoir" ? )


Ci-dessous les vestiges du tracé de l'ancien canal du trop plein des eaux vers le Jardin Public).


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ANECDOTES ET INFORMATIONS ANNEXES

Certains croient reconnaître dans cette fontaine celle qu'Ausone a célébrée sous le nom de « fons Divona ». Le Chroniqueur Jean Darnal, en 1559, a contribué à propager cette erreur en disant: « Les jurats firent faire une muraille à la fontaine d'Audége, pour la séparer du grand chemin et empêcher que les terres ne tombassent dans le vase de ladite fontaine, belle et abondante, et de laquelle parle dans ses oeuvres le poète Ausone, bourdelois et citoyen romain ». Il est certain que la font d'Audége ne peut point être la Divona d'Ausone, puisque que Ausone dit qu'elle était située au centre de la ville, tandis qu'Odeia est à l'extrémité d'un faubourg. 

Ci-dessous la "Fontaine Poliveau" de Paris, qui aurait pu servir d'inspiration possible à l'architecte bordelais...(?)

Il semble que le débit des sources de Fondaudège était jadis assez important pour permettre à un moulin d'utiliser la force de ses eaux...

7 octobre 1559: Un particulier est condamné en 10 livres d'amende et à un sac de farine envers les pauvres de l'hôpital Saint-André pour avoir été acheter dix ou douze sacs de farine aux chais pour revendre: la moitié de cette amende est employée à faire curer la fontaine d'Audège et l'autre moitié est remise au Trésorier de la Ville. (inventaire des registres de la Jurade 1520-1783)

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(la-petite-gironde/3-aout-1872)

(la-petite-gironde/11-mars-1875)


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> Création de la page & publication: 7 octobre2018. Posté le même jour sous pseudo "Djé Karl" sur le groupe public Facebook Bordeaux Je Me Souviens: LIEN du post